[Paris] Le "Temple"

Zilmar eut un sourire carnassier.

"Des oreilles indiscrètes ? Voyons."

Il fit un large mouvement de bras, pour désigner l'ensemble des personnes présentes.

"Voyez-vous ici quelqu'un qui pourrait s'intéressait à nos petites affaires ? Non, ils sont trop préoccupés par les plaisirs charnels ! Les hommes sont concupiscents voyez-vous ? Même les prêtres aiment l'alcool, la bonne chère et les femmes. Seulement, ceux-ci n'osent pas venir ici, ils demandent qu'on leur envoie le tout à domicile."

Fort satisfait de ses dernières paroles, Zilmar se courba devant la prêtresse.

"Si vous voulez bien me suivre, nous allons aller dans une pièce à l'écart.

Eryndel esquissa un sourire forcé à la dernière remarque de Zilmar - si seulement il avait pu avoir tort sur ce point...
Elle le remercia néanmoins et le suivit. Une fois qu'ils furent enfin isolés de la foule qui mettait la jeune femme mal à l'aise, elle reprit :
"Alors, avez-vous pu recueillir davantage d'informations concernant Larmesang ? Le temps presse, j'ai de bonnes raisons de croire qu'il est impliqué dans une affaire grave..."

"Bien évidemment, j'ai accumulé pas mal d'information durant ces quelques jours. Et au sujet de cette affaire grave, je pense malheureusement pouvoir confirmer."

Il fit une pause.

"Voyez-vous, Larmesang semble être devenu très influant à la cour. Sans doute trop... Il a la confiance et le soutien des nobles. D'ailleurs, certains semblent même être ses esclaves. Des goules, c'est bien cela ? Sans doute peu, une demi-douzaine d'après ce que je sais. Mais d'autres goules, recrutées parmi la plèbe, se comptent par dizaine. Je ne sais pas vraiment combien. Peut-être cent ou deux cents, environ. C'est suffisant pour gangréner tout Paris..."

Après avoir résumé la situation alarmante de la capitale, Zilmar soupira.

"Vous avez un plan ? Vous n'êtes que trois, et j'ai moi-même moins d'hommes que lui de goules..."

Eryndel hésita.
"J'ai bien un plan, mais... il ne me semble pas réalisable. Pas à si grande échelle.
C'est bien simple : je crois avoir enfin trouvé le moyen de guérir le vampirisme. Oui, le guérir. Cela peut paraître utopique, mais là, je suis sûre que ça va fonctionner. Si l'on pouvait trouver un moyen, une fois ce remède concocté, de l'insérer dans les greniers de nourriture de la ville, ce remède passerait dans le sang des humains. En buvant ce sang, les vampires avaleraient donc le remède et redeviendraient comme tout le monde.
Quant aux goules, liées par le sang à leurs créateurs, elle deviendraient ainsi impuissantes, je pense. Au pire, elles seraient juste suffisamment déboussolées pour que nous puissions les éliminer grâce à une intensive chasse inquisitoriale.
Il va sans dire que vous seriez protégé : vous êtes un être à part, votre coeur est bon quoique votre sang soit corrompu. Vous auriez pu nous tuer, frère Turmac et moi, à la première entrevue - les vôtres étaient si nombreux ! Pourtant, vous ne l'avez pas fait. Voilà pourquoi je vous garanti que je garderai secrète votre identité, que nous appliquions mon plan ou non."

Elle pencha la tête, se recueillant un instant. Son coeur battait à tout rompre à l'idée de mettre à l'épreuve d'une manière aussi radicale sa nouvelle théorie sur la guérison du vampirisme. Mais cette fois, elle ne se trompait pas, elle en était certaine.

"Qu'en pensez-vous, Zilmar ? Il faudra juste que nous trouvions quelqu'un sur qui tester le remède... Capturer Larmesang ou l'un de ses sbires avant toute chose pourrait nous être utile, donc. Ne croyez-vous pas ?"

Elle s'interrompit à nouveau,et reprit, davantage pour elle-même que pour son interlocuteur :
"Je dois prévenir Frère Armand de contacter les autres inquisiteurs disponibles en ce moment... En sortant d'ici, je me rends directement auprès de lui."

Guérir le vampirisme ? Zilmar n'y avait jamais songé. Mais apparement, c'était possible...

"Hum... Cela me parait irréalisable... Les greniers sont nombreux et bien gardés. Nous ne pourrions jamais mettre le remède en grande quantité dans chacun d'entre eux. Et il faudrait déjà capturer Larmesang."

Il fit une pause pour réfléchir.

"Larmesang a un emploi du temps assez strict, il est donc facile de savoir où il est à chaque instant. Seulement, la plupart des lieux où il va sont très bien gardés, il serait impossible de les prendre d'assaut. Le seul moyen que je vois serait de l'attaquer pendant les trajets, en pleine ville, dans les rues. Ca, ce serait faisable."

Une autre pause.

"Par contre, je ne sais pas si appeller d'autres inquisiteurs à la rescousse est une bonne idée. Beaucoup sont trop... Impulsifs. Ils pourraient faire des choses regretables par pur fanatisme. Enfin... Faites comme bon vous semble."

Eryndel devait admettre que le vampire avait parfaitement raison au sujet de l'impulsivité des Inquisiteurs. Peut-être Armand parviendrait-il à s'en tirer seul, avec l'aide de Frère Turmac, des hommes de Zilmar et d'elle-même ?

"Ecoutez, dit-elle enfin. Je vais questionner frère Armand à ce sujet, et vous rapporterai sa réponse. Je verrai également si nous pouvons tenir conseil avec lui et Turmac - je pense que le moment est venu de faire confiance à l'Inquisitueur. Dieu en est témoin, il est différent des autres. Peut-être ne devrions-nous pas lui dire que vous êtes un être de la nuit, cependant... On n'est jamais trop prudent.
Je vous tiens au courant de ce que j'aurai appris et de ce qui aura été décidé dès que je le puis. A bientôt, Vampire au coeur juste."

Elle le salua et s'en fut aussitôt d'un pas léger, mais rapide, pressée de retourner à la chapelle.

En direction de la petite chapelle dédiée à la Vierge.

En provenance d'une ruelle des Bas-Fonds

Les gens se retournaient sur le passage d'Eryndel et d'Armand, puis, quand il reconnaissaient la jeune femme, revenaient à leurs occupations, l'air indifférent. En arrivant à l'endroit où siégeait ordinairement Zilmar, son coeur se serra : il était absent, encore...
Elle intercepta l'un des gardes du vampire :
"Je dois absolument voir Zilmar. C'est urgent. Conduisez-moi à sa planque, je vous y ai déjà vu.

- C'est que..."
Le garde jeta un regard soupçonneux sur frère Armand.
"Il est avec moi, interrompit impatiemment la guérisseuse. N'ayez crainte, il ne nous trahira pas. Alors ?"
Il soupira, puis leur fit igne de le suivre.

Direction : La Planque de Zilmar

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